Roxanne, Valerie et moi étions était des amies d’enfance depuis le lycée. On se connaissait depuis la quatrième. Aujourd’hui, bien que toutes trois en couple, nous restions toujours inséparables. Nous nous réunissions très régulièrement entre filles. C’était comme une immuable tradition. Et ce jour-la ne faisait pas exception : on était toutes les trois, comme au bon vieux temps, comme lorsqu’on se faisait réciter les cours devant la salle de classe froide dans les couloirs froids juste avant l’examen d’histoire/géo. A l’époque, nous échangions tout. Les choses profondes comme les choses futiles : les conseils sur les meilleures marques de collants, sur les magasins, les tuyaux pour trouver des fringues branchées pas chères, que dire à nos parents si on voulait sortir avec des garçons, et autres sujets essentiels pour des adolescentes. Je repensais à ces jours où nous étions adolescentes. C’était il y a plus de dix ans. Et pourtant, c’était comme si c’était hier.
Il y avait eu le mariage de Valérie, ses grossesses, et maintenant c’était au tour de Roxanne, cette amie d’enfance avec qui j’avais ressenti autant de complicité en grandissant. C’était comme si ma sœur se mariait. Alors je souris comme je le pus en y mettant tout ce dont j’étais capable de compassion.
Je viens d’un monde où on est tous des acteurs expérimentés qui semblent sortis d’un stage intensif au cours Florent. On vit dans le non-dit et le fait d’intégrer les faux-semblants dans le quotidien est une question de survie. On voue un culte à des valeurs futiles et superficielles sans se rendre compte que c’est futile et superficiel. Les vraies relations humaines n’existent pas et sont bannies. Il n’y a que des schémas, de vagues interactions, et des photos de famille prévisibles et posées. Les rapports sociaux sont des rapports d’album photos. Je n’en rajoute même pas quand je dis cela : le temps que l’on passe vraiment ensemble se résume souvent à deux minutes ou l’on pose pour les photos. On les encadre, on les regarde des années après en se disant “tu te souviens?” sans vraiment savoir de quoi on se souvient… à part d’avoir passé deux minutes ensemble à poser pour une photo.